Cela fait longtemps que je voulais m’inscrire à cette course. En 2019, j’y courais mon premier gros trail (récit du raid de l’ultra-marin) et cela avait été magique ! Une superbe course sous la canicule et je venais à bout des 87km en moins de 12h avec dans un coin de ma tête l’envie de revenir pour le tour complet du Golfe et non pas une seule moitié.

C’est chose faite (ou preque) cette année avec une inscription à la course au mois de janvier. J’en fais mon objectif de l’année ! Cela tombe plutôt bien car elle se passe quatre semaines après le trail de Saint-Jacques qui m’aura fait une belle sortie longue en préparation. Pas de préparation spécifique pour l’ultra-marin, celle de Saint-Jacques aura été suffisante et j’ai ensuite fait de l’entretien ensuite avec 300km répartis sur le mois entre course à pied et vélo, auxquels il faut ajouter un peu de renforcement musculaire.

Le départ

J’arrive sur Vannes vers midi et je récupère mon dossard dans le village qui commence à s’animer. Je reste un peu de temps de voir les exposants, de chercher mon nom parmi la liste des participants et de faire une photo devant la belle affiche et je retourne à la voiture finir de préparer mes affaires et me reposer un peu.

Je reviens sur la zone de départ un peu avant 16h et l’ambiance est montée d’un cran. Il y a beaucoup plus de monde et je rejoins les Spartiates Runners pour discuter un peu. Yoann et Damien les représentent sur le grand raid et Rémi qui était présent à Saint-Jacques est aussi là pour les encourager.

17h : il est l’heure de rejoindre le sas de départ ! Le sas n°2 pour moi, soit en objectif moins de 30h. Mais en fait, les sas n’existent que sur le papier… aucun contrôle, aucun marquage… On se positionne du coup avec Yoann comme on peut à environ 40% des participants.

L’ambiance monte encore jusqu’à l’heure du départ avec une ola et un clapping, mais on sent surtout l’excitation des fauves prêts à être lâchés dans l’arène.

3, 2, 1 : c’est parti pour un tour du Golfe !

Le début de course

On part tranquille avec Yoann et on double rapidement des coureurs et quelques randonneurs… Oui, de vrais randonneurs qui se sont positionnés au tout début de la zone de départ et qui marchent avec leurs sacs de 20L… Je trouve toujours dommage que les participants ne respectent pas un minimum les temps qu’ils envisagent de faire lorsqu’ils se placent dans la zone de départ.

Je fais 2/3 km avec Yoann puis je pars seul devant à la faveur de quelques dépassements. Le gros plus du départ, c’est qu’il n’y a pas eu de bouchons et ça c’est vraiment agréable par rapport à d’autres courses. On longe la mer pendant plusieurs kilomètres et la vue est superbe même si le ciel est chargé.

Je continue ma remontée de coureurs sur un rythme d’environ 6’/km. Je croise ou plutôt rattrape Mario et Laura, les Innarêtables Runners. Mario me reconnait et on discute quelques minutes ensemble de nos objectifs respectifs, de la Diag (on avait fini à quelques minutes d’écart) et je reprends ma route en avant.

Tout se passe pour le mieux ! Il y a toujours beaucoup de longs chemins en bord de Golfe et il faut avouer que c’est plaisant. Les kilomètres s’enchainent et je revois Rémi avec qui je fais quelques centaines de mètres. Je maintiens mon rythme sans forcer au 6’/km et passe le semi en 2h 05.

Je m’arrête quelques minutes au 1er ravito, rempli une gourde d’eau et me rassasie avec quelques pâtes de fruits et un peu de rosette dans du pain de mie. En y repensant, c’est quand même pas terrible pour un repas du condamné !

Je passe ce ravitaillement en 2h50′ à la 273ème place.

La bascule

Je repars en intégrant quelques passages de marche dans mon rythme de course. La course va encore être longue donc il faut ménager la monture.

Je commence rapidement à avoir des problèmes gastriques : aigreurs d’estomacs, remontées acides et rôts intempestifs ! Je m’excuse d’ailleurs auprès de tous les traiteurs avec qui j’ai partagé un bout de chemin…

La pluie fait aussi son apparition vers le 33ème km. Je continue mon chemin, mais voyant que cela ne s’arrête pas, je me décide à enfiler la veste de pluie. Heureusement ! Quelques minutes plus tard, la pluie s’intensifie et les températures baissent assez rapidement.

Je continue jusqu’au 42ème km (passage au marathon en 4h 26) et arrive au ravitaillement du Hézo, où je prends bien plus de temps à cause de mes problèmes gastriques. J’échange quelques mots avec Guillaume (ultra_papa_schutz sur Instagram). La pluie semble s’arrêter et je décide de repartir en enlevant la veste de pluie mais sans la ranger dans le sac. Le fond de l’air s’est réchauffé et cela fait du bien au moral.

Je continue mon bonhomme de chemin en baissant encore un peu de rythme. Il est temps de sortir la frontale car la luminosité baisse rapidement. La suite se passe avec un rythme correct jusqu’au ravitaillement du 58ème km que je franchis aux alentours de minuit, soit après 7h de course. Je viens de perdre plus de 30 places sur le dernier tronçon et si on ajoute à cela tous les dépassements par des coureurs des équipes du relais, j’ai vraiment l’impression de ne pas avoir avancé. Le ventre ne s’arrange pas et je décide de faire l’impasse complète sur le ravito car depuis quelques kilomètres, les seules choses qui passent sont l’eau et la compote mais en toute petite quantité pour limiter les remontées acides. 242ème au ravitaillement, je suis large et encore dans les objectifs.

Au passage du 50ème km, je bats mon record de près de 45′. Ça a du bon les trails plats !

La nuit, le vent, la boue…

Il fait suffisamment chaud et heureusement, car sinon, on se croirait au Glazig. Le passage jusqu’au prochain ravitaillement sera l’un des plus compliqués de la course : beaucoup de sable, du vent, de la pluie de face, le tout de nuit ! Ca donne envie de faire du trail ? J’avoue que je me suis posé la question plus d’une fois à ce moment.

La fatigue s’en mêle

Je n’étais déjà pas en super forme mais à partir du 60ème kilomètre, je ressens une énorme fatigue… Pas musculaire, mais un état de fatigue générale. J’alterne de plus en plus la marche et la course. Mon rythme est maintenant plus proche des 9′ au km soit 6,5km/h. Je continue tant bien que mal et manque de m’endormir plusieurs fois en marchant. Je fais une nouvelle fois l’impasse sur le ravito du 70ème (ce qui me permet de regagner pas mal de places) et continue mon chemin bien difficilement. 206ème au chrono… c’est inespéré !

La fatigue s’accentue, le rythme baisse encore et approche des 6km/h et descend même en dessous. Je me résous à faire une pause pour dormir le long d’une route, derrière un rocher à l’abri du vent. Je suis tellement lucide que je prépare mon timer pour une durée de 15 minutes mais que j’oublie d’enclencher. Je m’endors rapidement mais pas de façon continue, car je suis au bord de la route et du passage des coureurs. Certains me demandent régulièrement si je vais bien. A un moment, je trouve étonnant de ne pas avoir entendu le minuteur et constate que j’ai oublié de le lancer ! À ce moment, je n’ai aucune idée du temps que j’ai passé sur le bas-côté. Je le remets à 8′ et vérifie par deux fois qu’il est bien lancé.

Lorsqu’il sonne, je me relève et repars ressourcé ! Grâce à la montre, je déduirai après la course que j’ai du me reposer environ 21/22 minutes (soit 13/14 minutes + 8 de bonus).

Un peu de répit

Je me sens mieux et je repars plus motivé que jamais. Je double pas mal de coureurs qui m’avaient dépassé pendant ma sieste et je me prends une gamelle (sans gravité) sur une racine qui dépassait. Je continue comme ça sur les 15km qui me séparent de la base de vie et y arrive au bout de 11h 35 de promenade, en 311ème position (100 places perdues sur la portion). Là encore, et malgré les circonstances et la sieste, je gagne plus de 30′ sur la distance du raid du Golfe de 2019.

Je retrouve Yoann à la base de vie qui est sur le point de repartir. Il ne m’avait pas vu en train de dormir caché derrière mon rocher et il repart quelques minutes avant moi. Je fais une pause d’une dizaine de minutes le temps de vider mes chaussures et de changer de t-shirt. J’essaye de manger un peu de saucisson mais ce n’est toujours pas ça. Je change également de frontale et garde uniquement la plus petite et plus légère (la fameuse de Sylvie qui m’a sauvé mon Grand Raid de la Réunion).

La traversée du Golfe

Les quelques kilomètres se font plutôt bien jusqu’à l’embarcadère pour la traversée de l’entrée du golfe et je vais pouvoir me poser dans le bateau. La traversée est super bien organisée. A peine arrivé, j’enfile un poncho puis un gilet de sauvetage et nous partons à 7 dans un semi rigide. Une traversée d’une dizaine de minutes au lever du jour, rythmée par les bateaux que nous croisons sur une mer calme. C’est un peu reposant et je suis pas loin de m’endormir même si ce n’est pas très confort !

Après la traversée, c’est reparti, direction Auray. De grandes lignes droites interminables, souvent des parties goudronnées et je lutte pour alterner marche et footing très tranquille. Je n’ai plus beaucoup de force et chaque kilomètre devient de plus en plus dur (surtout si on ajoute deux belles ampoules aux talons). J’atteins enfin le ravitaillement de Crac’h et sentant que cela devient dur, je me décide à me reposer une nouvelle fois 15′ en mettant le réveil ! Là, c’est beaucoup plus confort avec un lit de camp. Je discute un peu avec mes compagnons de repos qui paraissent dans un meilleur état que moi.

La fin où quand le corps dit stop

La sieste n’aura pas eu l’effet escompté. Je repars doucement et continue ma progression, mais plus les kilomètres passent moins mon rythme est important. J’enchaine piteusement les kilomètres avec un rythme à 4 ou 5 km/h en me faisant violence. Heureusement, on a le droit à de superbes paysages qui méritent quelques photos. Arrivé à Auray, vers le 120ème km, je me fais doubler par 2 ou 3 des sas du 56km qui partent tout juste. Même les tout-derniers me semblent aller à des vitesses hypersoniques tellement je n’ai plus aucune force.

Je commence à me faire à l’idée que le ravito suivant (au 124ème) sera peut être la fin pour moi car sur les 4 derniers kilomètres, je suis à 4km/h de moyenne. A ce rythme là, il me faudrait au moins 15h pour finir les 50 derniers km (si mon état de fatigue ne s’aggrave pas plus) alors que j’ai mis 17h pour les 125 premiers !

Je me traine tant bien que mal jusqu’à ce ravitaillement et jette l’éponge non sans regret. Je rends mon dossard. C’est mon premier abandon sur une course, mais il y a des jours où il faut savoir écouter son corps, où il faut savoir dire non !

La suite ?

Je pense que j’ai bien fait d’abandonner à cet endroit. A peine le dossard rendu, j’ai dormi 40′ sur place sur un pauvre banc en bois en attendant la navette qui me ramène à Vannes. Entre Vannes et la route du retour pour Rennes, j’ai dormi 4 fois 15′ pour me ressourcer ! Et une fois rendu chez moi, je me suis couché pour une nuit de 11h ! Oui, le corps en avait besoin. Oui, j’aurai certainement pu terminer car j’avais de très grosses marges sur les barrières horaires, mais est ce que cela aurait été raisonnable ? Au risque de se blesser ?

Un peu de positif tout de même ?

Bien sur ! Un RP sur 50km de plus de 40′, un RP sur le 87km du Golfe par rapport à 2019 de plus de 30′ (en ayant galéré sur la deuxième partie)… Donc, cela ne veut dire qu’une chose : l’entrainement paye !

Beaucoup de frustration…

Plus que de la déception, c’est de la frustration ! Je ne pense pas que le trail de Saint-Jacques et celui de l’ultra-marin étaient trop proches. La récupération était au top, sauf peut-être pour les ampoules ! Les jambes répondaient bien, preuve en est j’ai fait une sortie de 50km le dimanche en vélo après ma grosse nuit. C’était vraiment un problème de fatigue générale plus le côté gastrique qui n’a rien ajouté. Peut-être (surement) que les deux étaient liés d’ailleurs. Je retenterai surement le grand raid du Golfe une prochaine fois mais en attendant, il va me falloir un peu de temps pour digérer cela.